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Projection sur le thème "Cinéma et Photographie" au Louxor

C'est en plein été qu'a jailli l'idée de proposer au Louxor une séance sur les liens entre Cinéma et Photographie. J'allais y exposer la troisième version de ma série en renouvellement permanent, la Couleur du hasard, et avant même que l'exposition ne commence et que le vernissage n'ait lieu, et avant même qu'ils ne soient venus, par anticipation, je cherchais un moyen de refaire venir des gens - hors vernissage donc. J'allais exposer dans un cinéma, alors pourquoi pas un film? Un film qui serait totalement lié à la photographie. Et pourquoi ne pas inviter un spécialiste de la question pour en parler après la projection? Mais oui, pourquoi pas. Il convenait de s'adapter au lieu qui avait bien voulu accueillir mes images fixes. Et ce lieu avait l'habitude, quotidiennement, de montrer des images en mouvement.

C'est en découvrant, dans le catalogue de la bibliothèque François Truffaut, l'existence du livre Outside. Quand la photographie s’empare du cinéma de Stefan Cornic (éd. Carlotta, 2014) que je me suis rappelé de celle de ce film américain des années 50 dont j'avais entendu parler à l'époque de sa sortie en dvd, Le petit fugitif. Je l'avais alors complément raté, alors même que j'avais lu deci delà plusieurs éloges à son propos. Je n'avais même plus pensé à me rattraper par la suite. Je tenais donc là l'occasion de le faire.

Il ne me fallut pas plus de quelques minutes de visionnage du film pour savoir que c'était cette oeuvre cinématographique, et pas une autre, que j'allais proposer au Louxor en premier lieu. Et que j'allais demander que soit invité Stefan Cornic pour venir à la rencontre des spectateurs. Et que j'allais également solliciter le cinéma pour montrer en accompagnement (entrée ou dessert) mon court métrage La lumière de l'Est lointain.

Je remercie l'équipe du Louxor d'avoir accepté cette proposition dans sa globalité.

Le court texte qui termine cet article, à lire ci-dessous, pourrait faire figure d'introduction à cette séance.

Programme de la séance Cinéma et Photographie

Dimanche 10 novembre à 11h

Dans le cadre des Rencontres Photos du 10e

  • Le petit fugitif (1h20, 1953)

De Morris Engel et Ruth Orkin

Résumé : Brooklyn dans les années 50 : la mère de Lennie lui confie la garde de son petit frère Joey, âgé de 7 ans, car elle doit se rendre au chevet de la grand-mère, malade. Mais Lennie avait prévu de passer le week-end avec ses amis. Irrité de devoir emmener son petit frère partout avec lui, il décide de lui jouer un tour en simulant un accident de carabine sur un terrain vague. Persuadé d'avoir causé la mort de son frère, Joey s'enfuit à Coney Island, immense plage new-yorkaise dédiée aux manèges et à l'amusement. Il va passer une journée et une nuit d'errance au milieu de la foule et des attractions foraines...

Morris Engel et Ruth Orkin étaient photographes avant de réaliser ce film. Toute la mise en scène est entièrement inspirée par leur pratique de la streetphotography.


  • Rencontre avec Stefan Cornic

Historien de l’art de formation, diplômé de Sorbonne Paris I et de la Columbia University, Stefan Cornic est auteur-réalisateur. Spécialisé dans les rapports entre art, architecture et cinéma, il a écrit pour Le Journal des Arts avant de travailler comme JRI pour l’émission culturelle quotidienne Entrée Libre sur France 5. En plus d'être l'auteur de l'ouvrage déjà mentionné sur Le petit fugitif, il a réalisé un documentaire sur Jim Jarmusch, Jim Jarmusch, poèmes sur pellicule (Ciné+ 2018).

Sujet de la discussion : Comment l'art et la pratique des photographes qu'étaient Morris Engel et Ruth Orkin ont imprégné le travail et l'esthétique des cinéastes qu'ils sont alors devenus?

Photographie : Doriane Lacroix


  • La lumière de l'Est lointain (2016, 15 min)

Résumé : Une jeune femme relate les réflexions et les expériences d'un jeune photographe en Asie. Les photographies de ce dernier, prises dans différents pays (Cambodge, Chine, Corée du Sud, Japon, Inde, Hong Kong, Thaïlande, Taiwan et Vietnam), défilent sur l'écran. Les mots de la narratrice et les images du voyageur se mêlent étroitement. Leur union vient nous parler du Voyage et de la Photographie, comment l'un et l'autre fonctionnent si bien ensemble.

Production : aaa production / Montage : Virgile Guihard / Musique originale : Ludovic Hacout et Nicolas Mauduit / Voix-off : Justine Haelters / Mixage : Julien Roger





En guise d'intro

"Les rapports entre cinéma et photographie sont évidents. "semblent évidents", en réalité. Par leur nature liée à l'image, bien sûr. Et par leur technique. En somme une machine (l'appareil photo, la caméra) est utilisée dans les deux cas pour capter, saisir, enregistrer ce qu'elle a devant soi sur une bobine, sur un rouleau, maintenant dans une carte mémoire. Il y a un capteur, un objectif, une mise au point, des échelles de plan, un sujet souvent, un décor à éclairer, que ce soit artificiellement, avec des mandarines, des spots, ou bien en lumière naturelle, avec le soleil, la grisaille, la lune. Et ce que l'on enregistre peut être du réel brut, ou au contraire une mise en scène inventée, fictionnelle : on peut donc faire du documentaire, ou de la fiction, même si l'on sait bien que cette distinction est rapidement caduque, plus complexe et entremêlée quand on la soumet à l'épreuve des faits, disons. Mais quoiqu'il en soit, en photo comme au cinéma, on est de plein pied dans le domaine de l'Image, dans le règne de l'Image. Par ailleurs, autre rapprochement, on peut dans l'un comme dans l'autre, raconter une histoire. Robert McLiam Wilson, romancier et journaliste irlandais vivant en France, dans un texte qui accompagne une série de photos prise dans le nord de l'Angleterre et en Ecosse par la photographe française Géraldine May, une série qui s'intitule North end, a d'ailleurs écrit qu'il "détestait les photographes". Oui, il les hait (avec une belle ironie) car ils ont la capacité en une seule image de pouvoir raconter une histoire que les romanciers doivent, eux, relater avec une grande quantité de mots. Donc oui, il y a de la narration au cinéma, on le savait déjà, mais il y en a aussi en photographie, on ne le dit pas assez.

Néanmoins, la grande différence, bien sûr, tient dans le mouvement et dans le montage. Et même si en photo, il soit possible de saisir le mouvement (il s'agit plutôt d'un bougé "figé") et même s'il y a souvent des séries construites en diptyque ou en triptyque, le cinéma possède là cette particularité spécifique d'être en mesure d'enregistrer des personnages qui se meuvent vraiment. Et qui plus est, autre supériorité : des personnages qui parlent! Il a également le grand avantage, par le montage de différents plans, de recréer une continuité narrative, ou parfois une discontinuité non-narrative, pourquoi pas, tout est possible.

Les liens sont pourtant nombreux entre ces deux arts. Il y a par exemple des photographes-cinéastes, ou alors des cinéastes-photographes. Citons Alain Resnais, c'est peu connu, mais qui prenait de grandes photos lors de ses repérages ; Raymond Depardon bien sûr ; Agnès Varda bien entendu ; Chris Marker, c'est une évidence ; William Klein (qui d'après sa filmographie aurait réalisé 24 films, clips, reportages, tout genre confondu, c'est dire) ; Stanley Kubrick a été photographe avant de devenir le réalisateur que l'on sait ; Robert Frank a mis en scène des fictions comme des docs ; Robert Flaherty, avant de réaliser son film le plus connu, Nanook l'esquimau, avait déjà effectué un reportage photographique sur les Inuits ; On peut également citer Wim Wenders, photographe tout autant que réalisateur, qui a pu exposer son travail dans ce domaine en 2018 au musée C/O de Berlin, l'exposition s'appelait Instant Stories. Il se trouve que la revue Positif avait monté en 1992 une exposition de photographies prises par des cinéastes. Et dans cette expo, on trouvait également d'autres noms : Jacques Demy, Michel Deville, Clouzot, Jerry Schatzberg, entre autres.

Il est intéressant de découvrir dans les images fixes de ces cinéastes l'esthétique visuelle comme les obsessions narratives qui définissent leurs films en mouvement.

Les deux autres photographes-cinéastes que je n'ai délibérément pas mentionnés ici sont évidemment Morris Engel et Ruth Orkin, photographes américains finalement méconnus pour leur travail photographique, mais bien plus reconnus comme co-réalisateurs du film programmé le 10 novembre au Louxor, à savoir Le petit fugitif. Mais je ne vais pas m'étendre ici puisque Stefan Cornic donnera sur place, à qui sera présent dans la salle, de nombreuses explications sur la manière dont ils sont passés de la photo au cinéma.

À l'Affiche
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